Rénovation d’un quartier ancien à Copenhague

La ville de Copenhague est parvenue à réduire de 23% ses émissions de C02 entre 1990 et 2000. Dans le cadre de son Agenda 21, elle s’est fixé pour objectif une réduction supplémentaire de 12% de ses émissions d’ici 2010. Gros plan sur une de ses vitrines écologiques, le quartier de Vesterbro, qui a fait l’objet d’une rénovation urbaine en misant sur l’adhésion des habitants.

 

 

Des tables et bancs en bois, des barbecues et des jeux d’enfants parfaitement entretenus, très prisés des habitants dès les premiers rayons de soleil, trônent en bas des immeubles de cinq à six étages peints de couleurs vives. Des espaces verts et des bassins desservis par de petites rigoles alimentées par les eaux pluviales ont remplacés de sinistres cours intérieures pour le plus grand bonheur des habitants, des insectes et des oiseaux.

Nous sommes au Sud-Ouest de la capitale danoise, dans le quartier de Vesterbro construit entre 1870 et 1910.

Erigé au Sud du célèbre parc de Tivoli et de la gare centrale, Vesterbro s’étend sur 35 hectares. Il se compose d’une vingtaine de blocs d’immeubles réunissant quelques 4·000 logements de petite dimension et au confort spartiate, devenus insalubres. Bon nombre d’appartements ne possédaient ni chauffage central ni salles de bains. Au début des années 1990, ce quartier de 6·000 habitants est peuplé d’étudiants, d’immigrés venus des campagnes lors de l’industrialisation du pays et de retraités. Le taux de chômage (20%) est deux fois plus élevé que la moyenne nationale.

Vesterbro, projet pilote et dimension participative

A Copenhague, la Commune décide de lancer, en 1990, la rénovation du quartier de Vesterbro. Celle ci doit s’étaler sur six à dix ans. L’objectif·? Améliorer la qualité de vie des habitants en créant des logements plus grands et dotés de tout le confort moderne mais aussi réduire les consommations énergétiques. Vesterbro est destiné à devenir un projet pilote exemplaire en matière de rénovation écologique. Il s’agit de démontrer que l’on peut installer des solutions techniques performantes dans des bâtiments de la fin du XIXe siècle.

En 1991, la municipalité adopte un plan d’actions de rénovation urbaine prenant appui sur de fermes résolutions écologiques·: énergie solaire passive, économies d’eau et d’électricité, création de zones vertes, tri sélectif des déchets et mobilité douce. Les zones de rénovation sont scindées en 22 îlots de 10 à 20 immeubles réunissant, chacun, entre 100 et 300 logements. Un plan de rénovation est établi pour chaque îlot. La gestion des opérations est confiée à une société à but non lucratif, la SBS Byfornyelse, qui avait déjà conduit avec succès une expérience de rénovation urbaine à Aalborg, une ville importante située dans le Jutland au Nord du pays. Cette agence regroupe des architectes, des sociologues, des assistants sociaux et des animateurs de quartiers.

La réhabilitation physique des lieux doit obligatoirement être accompagnée d’une dimension sociale et participative. Les habitants sont invités à se réunir en conseils d’îlot pour faciliter les échanges avec les pouvoirs publics.

C’est à Hedebygade, un bloc d’immeubles construit entre 1870 et 1910, que les objectifs de réduction des consommations énergétiques et d’exigences écologiques ont été les plus poussés. Il s’agissait de ne pas dépasser 92kwh/m2/an pour la production de chauffage, d’électricité et la ventilation. Une norme fixée par la réglementation thermique (RT 95) alors en vigueur pour les immeubles neufs.

Hedebygade, modèle d’écologie urbaine

Il fait bon vivre dans cet ancien quartier ouvrier où les espaces verts et les vélos sont rois. Les anciens sex-shops et commerces de boucherie ont cédé la place à des cafés-restaurants alternatifs, quelques boutiques de vêtements écolos et une poignée de galeries d’art. Les immeubles en briques ou en pierres de couleurs pastelles de 5 ou 6 étages sont articulés autour de cours intérieures transformées en petits jardins paysagers conçus en association avec les habitants. La municipalité a voulu faire d’Hedebygade, îlot composé de 18 immeubles de 281 logements, une vitrine de l’innovation technologique et un modèle d’écologie urbaine.

Différentes solutions techniques ont été mises en œuvre. Mais tous ont bénéficié d’un socle commun : installation de compteurs individuels de consommation d’électricité, d’eau chaude et de chauffage dans chaque appartement, construction de maisonnettes en bois pour le tri sélectif et le recyclage des déchets, purification naturelle de l’air des appartements à l’aide de plantes vertes, aménagement de cuisines écologiques équipées de bacs pour faire pousser des plantes et des légumes. Une maison communautaire, bâtie au centre de l’îlot, abrite une laverie, une cuisine et une salle de réunion.

L’accent a été mis particulièrement sur la réduction de la consommation d’énergie et d’eau dans l’habitat.

A Hedebygade, les travaux ont débuté en 1998 pour s’achever en 2002. Les opérations d’efficacité énergétiques se sont concentrées sur le cœur de l’îlot composé de sept immeubles de 115 appartements réunis autour d’une grande cour commune. Par la suite, après le départ des sociaux démocrates, le gouvernement de droite libéral arrivé au pouvoir en 2001 n’a pas souhaité étendre cette opération de rénovation écologique à d’autres immeubles du quartier.

Seuls les murs extérieurs des bâtiments ont été conservés. Ceux-ci ont tous été pourvus de nouvelles toitures, de cloisons, de nouvelles fenêtres dotées de doubles vitrages bois ou aluminium, de chauffages reliés au réseau de chaleur urbain au gaz naturel et de systèmes de VMC double flux. On a privilégié l’utilisation d’énergie solaire pour la production d’électricité et d’eau chaude sanitaire, exploité l’inertie des bâtiments en utilisant les apports solaires passifs, et privilégié l’éclairage naturel.

L’isolation intérieure des murs des immeubles (100 mm) et celle des toitures (200 à 300 mm) ont été réalisées essentiellement avec de la laine de roche. En raison des contraintes architecturales, l’isolation extérieure de ces immeubles datant de la fin du XIXe siècle, s’est concentrée principalement sur les façades donnant sur la cour.

Le souci de faire d’Hedebygade une vitrine des possibles en matière de rénovations écologiques a amené les coordinateurs du projet à tester une large palette de solutions techniques.

Les façades de plusieurs immeubles de l’îlot donnant sur la cour intérieure ont ainsi été recouvertes d’une deuxième peau faite de parois vitrées en verre dépoli à haute performance thermique visant à réduire les déperditions de chaleur et à optimiser l’utilisation de l’énergie solaire passive. Ces parois vitrées modulables appelée façades flexibles recouvrent tantôt la totalité des façades, tantôt uniquement les balcons transformés en patios de 6 m2 flanqués de bow-windows. La plupart de ces façades vitrées modulables intègrent des cellules photovoltaïques pour la production d’électricité.

D’autres solutions techniques ont été expérimentées sur un immeuble situé à l’angle des rues Tondergade et Sundevedsgade·: doubles vitrages très performants (U= 1,3W/m2K), 60 m2 de panneaux photovoltaïques sur la façade des cages d’escalier, 35m2 de panneaux solaires sur les toits pour la production d’eau chaude sanitaire. Ce dispositif repose aussi un chauffage urbain à basse température, des VMC double flux avec récupération de chaleur.

La réduction de la consommation d’eau potable (passer de 125 litres d’eau par personne et par jour en 2002 à 100 litres en 2010) figurait également au nombre des objectifs de la municipalité. Elle a été rendue possible grâce à l’installation d’économiseurs d’eau sur les douches et les robinets et de chasses d’eau à deux vitesses qui ne dépassent pas les 3,5 litres. Pour alimenter ces dernières, une grande quantité d’eau de pluie provenant des toits (12m3 pour 170 m2 de toiture) est récupérée.

Bilan de cette opération d’écologie urbaine ? Les dispositifs mis en place ont permis d’aboutir à une consommation énergétique moyenne de 105 à 110 kwh/m2/an pour l’eau chaude sanitaire et le chauffage dans l’îlot Hedebygade. Les performances mesurées varient néanmoins selon les procédés mis en œuvre. Les solutions techniques misant sur des façades flexibles et celle retenues pour les immeubles des rues Tondergade et Sundevedsgade· ont obtenu les meilleures performances·: 80 Kwh/m2/an pour le chauffage et l’eau chaude sanitaire.

Le coût de la rénovation par bloc d’immeubles s’est élevé en moyenne à 2·280 euros par m2. Le coût total de l’opération de renouvellement urbain a atteint 45,5 millions d’euros pour l’îlot Hedebygade dont 10,2% de surcoût dus aux investissements techniques et écologiques.

Ces opérations ont été financées par la Ville de Copenhague, le ministère de l’urbanisme et du logement qui a appuyé les projets écologiques (tri des déchets et panneaux solaires) et la Communauté européenne qui a, elle, prise en charge les opérations d’optimisation énergétique grâce au programme Thermie.

Celle ci s’est malheureusement traduite également par de fortes augmentations des loyers qui ont fait fuir les ménages les plus modestes. Ce, malgré les souhaits exprimés par la municipalité de maintenir sur place la population d’origine.

 

Pour aller plus loin·:

Vesterbro center-Byfornyelsescenter

Valdemarsgade 4

1665 Copenhague

Tél·: + 45 33 22 95 22

www.miljoe.kk.dk

www.europeangreencities.com/demoprojects/denmark-copenhagen

«·L’urbanisme durable. Concevoir un écoquartier», par Catherine Charlot-Valdieu et Philippe Outrequin (Editions Le Moniteur, 2009).

«·Ecoquartiers en Europe·» par Philippe Bovet (éditions Terre vivante, 2009)

Pour en savoir plus sur la technologie des façades flexibles solaires, contactez

Turnkey contractor

Tél·: 00 45 35 39 11 99 ou Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

www.plan1.dk

Un héliostat pour favoriser l’éclairage naturel (encadré)

«·Nous avons essayé d’optimiser le plus possible la lumière naturelle», lance Kurt K. Christensen en désignant un étrange panneau mobile perché en haut d’un immeuble, au sommet d’une sorte de cage d’escalier vitrée. Ce prisme, guidé par un ordinateur, réfléchit la lumière grâce à un miroir et l’oriente vers un puits situé au centre d’un immeuble. La lumière ainsi capturée est dirigée vers d’autres miroirs situés à chaque étage puis diffusée vers les cuisines et les salles d’eau situées de part et d’autre du puits de lumière. Des cloisons translucides ont été aménagées à l’entrée des appartements afin de diffuser cette lumière naturelle à l’intérieur ainsi que des peintures réfléchissantes. Les études menées par le Centre de recherche du bâtiment et le Centre danois pour l’écologie montrent que l’héliostat a permis de réaliser des économies d’électricité. Le bilan est donc positif malgré quelques problèmes de maintenance technique dus à la nouveauté de l’installation.

Pour en savoir plus, contactez

Turnkey contractor

Tél·: 00 45 33 13 81 11 ou Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

 

 

 


Citation

"L'utopie est un mirage que personne n'a jamais atteint, mais sans lequel aucune caravane ne serait jamais partie."

Proverbe arabe